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C-18 : Google va retirer les liens des médias canadiens

Les « géants du web » n’ont pas attendu bien longtemps avant de riposter après l’adoption de la Loi sur les nouvelles en ligne (issue du projet de loi C-18) par Ottawa.

Le logo de Google.

Après Meta, Google met de la pression sur le gouvernement canadien à la suite de l'adoption de la loi forçant les géants du web à rémunérer les médias pour l'utilisation de leur contenu lorsqu'il est partagé ou utilisé en ligne.

Photo : Reuters / Andre Kelly

Radio-Canada

Google a annoncé jeudi qu’il supprimera les liens vers les nouvelles canadiennes de ses produits alors que Meta met fin à de nombreuses ententes avec des médias canadiens.

La Loi sur les nouvelles en ligne oblige les géants du web à s’entendre avec les médias afin de rémunérer le partage de leurs articles et reportages. Cette mesure, adoptée le 22 juin dernier, entrera en vigueur dans six mois.

Google riposte

Google soutient que son moteur de recherche ne proposera plus de liens d'actualités à cette date butoir, ce qui comprend les liens sur Google News et Google Discover, des fonctionnalités qui aident les gens à personnaliser ou à trouver des contenus en ligne.

La société de technologie a aussi annoncé qu'elle sabrait Vitrine Google Actualités au Canada, un programme de licence pour les actualités de plus de 150 médias locaux.

Bras de fer entre les géants du web et Ottawa

Consulter le dossier complet

Deux mains se touchent.

Le président des affaires internationales de Google et de sa société mère Alphabet, Kent Walker, s'est dit déçu d'en arriver là, mais a ajouté que la loi restait inapplicable, selon des propos rapportés par La Presse canadienne.

Dans un article de blogue publié jeudi sur le site web de Google, M. Walker a souligné que la nouvelle loi créait un prix sur les liens, ce qui entraîne une responsabilité financière non plafonnée simplement pour avoir facilité l'accès des Canadiens aux nouvelles des éditeurs canadiens.

Nous ne prenons pas cette décision ni ses conséquences à la légère et nous pensons qu'il est important de faire preuve de transparence à l'égard des éditeurs canadiens et de nos utilisateurs le plus tôt possible.

Une citation de Kent Walker, président des affaires internationales de Google et de sa société mère, Alphabet

Google cherchait à obtenir des assurances sur le coût que cela pourrait représenter pour elle et sur le déroulement du processus de négociation. Ces détails deviendront probablement clairs une fois le processus réglementaire du projet de loi terminé, auquel Google a déclaré qu'il participerait.

Google avait annoncé ses couleurs dès février, en bloquant l'accès aux contenus d'information à environ 4 % des utilisateurs canadiens.

Pablo Rodriguez, ministre canadien du Patrimoine, à son arrivée à une réunion du caucus libéral en février 2023.

Entrevue avec le ministre Pablo Rodriguez

Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick

Pablo Rodriguez surpris par la décision de Google

Les géants du web préfèrent dépenser de l'argent pour modifier leur plateforme afin de bloquer l'accès aux nouvelles au lieu de payer leur juste part pour le travail des médias, a d'abord réagi le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez, dans une déclaration écrite transmise à Radio-Canada.

Ça démontre à quel point ils sont irresponsables et déconnectés de la réalité, alors qu'ils font des milliards de dollars grâce aux utilisateurs canadiens.

Une citation de Pablo Rodriguez, ministre du Patrimoine canadien

En entrevue sur les ondes d'ICI RDI, il a ajouté qu'il était surpris de la réaction de Google, entre autres parce que la loi prévoit une fenêtre de six mois avant son entrée en vigueur afin d'élaborer les règlements et les détails du nouveau cadre législatif. D'autre part, il souligne que les discussions en cours sont plutôt positives.

Le Canada ose aller de l'avant, ose tenir tête aux géants du web, et ils ne l'acceptent pas. Ils essaient d'envoyer un message [aux autres pays qui souhaitent réglementer le web] mais, nous, on va continuer à se tenir debout, a-t-il réaffirmé, soulignant que le statu quo était absolument impossible. Depuis 2008, près de 500 salles de rédaction ont fermé à travers le pays, a indiqué M. Rodriguez.

On a besoin d'une presse qui soit libre, forte, indépendante et non partisane. Les revenus vont, présentement, à deux compagnies – Google et Facebook – et on ne peut pas continuer de vivre comme cela.

Une citation de Pablo Rodriguez, ministre du Patrimoine canadien

Dans les négociations avec les géants du web, et avec les entreprises américaines en général, c'est important d'être poli, d'être clair, d'être diplomatique, mais en bout de ligne, d'être prêt à prendre une position forte, a pour sa part commenté la vice-première ministre et ministre des Finances du Canada, Chrystia Freeland.

On est un pays souverain, a ajouté le ministre du Patrimoine canadien.

Meta met fin à ses ententes avec des médias canadiens

Le logo de Facebook dans un téléphone cellulaire tenu devant le logo de Meta.

En réponse au projet de loi C-18, Meta a annoncé qu'elle bloquera l’accès aux nouvelles sur Facebook et Instagram au Canada. (Photo d'archives)

Photo : Reuters / Dado Ruvic

Meta a mis fin à ses ententes avec La Presse canadienne et la Coopérative nationale de l’information indépendante (CN2I), en réponse à l’adoption de la Loi sur les nouvelles en ligne par le Parlement canadien.

La CN2I – qui regroupe les quotidiens régionaux Le Soleil, Le Quotidien, La Tribune, La Voix de l’Est, Le Nouvelliste et Le Droit – faisait partie d’un groupe d’une vingtaine de médias qui avaient conclu des ententes avec Meta (Facebook, Instagram et Whatsapp) en mai 2021.

Le Devoir, le Globe and Mail et le Toronto Star avaient signé des ententes similaires avec l’entreprise de Mark Zuckerberg.

La directrice générale de la CN2I, Geneviève Rossier, résume dans un article publié par Le Soleil que leur entente de redevances avec le géant californien prendra fin le 31 juillet 2023.

Meta a déterminé que ça aurait un impact négatif sur leur positionnement et sur la distribution des nouvelles sur leurs plateformes. Nous sommes déçus de cette décision de notre partenaire, il s’agissait d’un montant quand même substantiel, affirme Mme Rossier dans l’article du média régional basé à Québec, sans préciser les détails de l’entente confidentielle.

Selon le professeur à l’École des médias de l’UQAM Jean-Hugues Roy, qui était en entrevue sur les ondes d'ICI RDI, l’annonce de Meta a créé de l’inquiétude dans les salles de nouvelles des journaux locaux membres de la CN2I, leur rappelant les années d’incertitude prépandémiques qui ont mené à des mesures fiscales pour soutenir le contenu journalistique canadien, dont certaines arriveront à échéance en 2024.

Meta a aussi annoncé à La Presse canadienne qu’elle mettait fin à l’accord qui permettait d’offrir des bourses de journalisme dans la foulée de l’adoption de C-18.

Meta allègue que cette loi a un impact négatif sur ses activités au Canada. Les ententes de bourses déjà signées seront honorées, mais cette cohorte [de huit journalistes] sera la dernière, a indiqué le président de La Presse canadienne, Malcolm Kirk, dans une communication interne consultée par Radio-Canada.

Il est important de reconnaître l'importante contribution de tous les journalistes qui ont joint notre équipe dans le cadre de ce programme, ainsi que le travail des rédacteurs en chef, des reporters, des rédacteurs et de l'ensemble du personnel de La Presse canadienne dans l'encadrement des boursiers […] Le programme a contribué de manière significative à la publication d'informations pertinentes et a apporté une contribution essentielle à notre travail pendant la pandémie, écrit-il.

Tests et intimidation

Au cours des derniers mois, Google et Meta ont menacé de bloquer l’accès aux contenus d’information sur leurs plateformes. Alors que le projet de loi franchissait les étapes pour devenir réalité, ils ont réalisé des tests sur une partie aléatoire des utilisateurs.

Pablo Rodriguez, qui a porté le projet de loi, a qualifié ces démarches d’intimidation. Plus tôt cette semaine, il a indiqué à La Presse canadienne qu'il espérait que le gouvernement parvienne à une résolution positive avec les deux sociétés pour les empêcher de supprimer des informations.

Une loi similaire a été adoptée en Australie en 2021, suscitant des ripostes du même genre de la part des géants du web. Ils se sont finalement soumis aux nouvelles règles, ce qui fait croire à M. Rodriguez que le même dénouement peut être espéré dans le cas canadien.

Il a par ailleurs assuré que le gouvernement veillera à ce que les salles de nouvelles disposent des ressources nécessaires pour survivre.

Des artisans de l'information, dont le président de La Presse, Pierre-Elliott Levasseur, ont confié à Radio-Canada dans les jours suivant l'adoption de la Loi sur les nouvelles en ligne que les menaces et les sanctions qui en découlent visent à éviter que des lois similaires soient adoptées aux États-Unis et en Europe.

Meta prendrait ainsi les Canadiens et les Canadiennes en otages, dans l'espoir d'intimider les gouvernements européens et américain.

La Loi sur les nouvelles en ligne vise à créer une nouvelle surveillance gouvernementale des géants du numérique qui dominent le marché de la publicité en ligne.

Nous dépendons tous d'un Internet libre, a réagi jeudi le directeur des relations avec les médias pour CBC, Leon Mar.

Il serait regrettable que les plateformes numériques profitent de leur position dominante pour refuser aux Canadiens l'accès aux nouvelles et aux informations. Nous encourageons les Canadiens à se rendre directement sur les sites web et les applications auxquels ils font confiance pour s'informer.

Une citation de Leon Mar, directeur des relations avec les médias, CBC

Le gouvernement libéral considère la domination de Meta et de Google sur Internet, et leur décision de supprimer les nouvelles, comme une menace pour la démocratie canadienne à un moment où l'industrie de l'information continue de faire face à des compressions en raison de la baisse des revenus publicitaires.

Avec les informations de La Presse canadienne

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