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La petite histoire du journal Atuaqnik, la voix des Nunavimmiut

Portrait d'Alec Gordon dans les studios de CBC à Kuujjuaq.

Alec Gordon travaille depuis plus de 30 ans pour CBC à Kuujjuaq, d'où il anime une émission de radio régionale.

Photo : Radio-Canada / Félix Lebel

Entre 1979 et 1980, quelques journalistes débrouillards ont réussi à produire le journal Atuaqnik, qui abordait des enjeux importants du Nunavik, alors en pleine effervescence. Malgré leurs moyens limités, ils étaient habités par une forte volonté d’informer de façon objective les Nunavimmiut dans leur langue.

Alec Gordon se remémore avec joie ses années passées à diriger le journal, qu’il a fondé à Kuujjuaq avec son ami Michael McGoldrick.

Ils ont installé leurs bureaux dans un ancien atelier mécanique de motoneige, presque abandonné. Quelques coups de marteau et de pinceau plus tard, leur salle de nouvelles était née.

Un bâtiment coloré à Kuujjuaq.

Les bureaux d'Atuaqnik ont été installés dans cet ancien garage.

Photo : Radio-Canada / Félix Lebel

L’époque était par ailleurs très effervescente du point de vue politique. Le Nunavik venait à peine de signer la Convention de la Baie-James et du Nord québécois (CBJNQ) quelques années plus tôt. Hydro-Québec était aussi en pleine expansion de ses capacités hydroélectriques dans la région.

C’était vraiment excitant! Enfin, les voix des Inuit étaient entendues. Toutes ces choses que les Inuit ont négociées prenaient forme. L’argent de l’entente commençait à arriver dans la région. Il y avait plusieurs organisations qui venaient à peine d’être fondées, explique Alec Gordon dans les bureaux de CBC de Kuujjuaq, d’où il anime aujourd’hui une émission de radio régionale en inuktitut.

Portrait d'Alec Gordon.

Alec Gordon occupait à l'époque le poste de rédacteur en chef du journal.

Photo : Radio-Canada / Félix Lebel

L’idée de fonder un journal en anglais et en inuktitut lui était venue en voyant le manque d’information régionale offerte à l’époque aux Nunavimmiut.

Ce n'était pas tout le monde qui avait une radio à ce moment-là. C’était dur d’avoir une information sur ce qui se passait au quotidien dans les communautés, explique-t-il.

Les villages du Nunavik étaient aussi divisés sur la question de la signature de la Convention de la Baie-James. Certaines communautés se sont opposées à sa signature et à la création des entités régionales comme la société Makivvik et la Commission scolaire Kativik.

Ça a vraiment divisé les mentalités des communautés. Nous voulions un journal qui allait bien représenter ceux en faveur et ceux en désaccord avec la Convention de la Baie-James. On pensait qu’un journal indépendant était la meilleure approche pour présenter une diversité d'idées, ajoute Alec Gordon.

Un témoin de l'histoire

Durant ses deux années de vie, le journal Atuaqnik a été témoin d’une foule d'événements marquants de la région, rapportés notamment par les journalistes William Tagoona et Willie Adams.

Portrait de William Tagoona.

On voit ici William Tagoona, alors en plein travail journalistique.

Photo : Radio-Canada / Félix Lebel

On a pu y lire des articles portant par exemple sur l’arrivée de la télévision au Nunavik et la construction du premier hôpital régional.

On ne parlait pas seulement de politique, il y avait aussi des actualités plus générales. Tout ce qui avait un certain intérêt pour le public, on l'ajoutait, explique Alec Gordon.

Alec Gordon feuillette une ancienne édition du journal.

En parcourant ses archives, Alec Gordon était surpris de voir que certaines problématiques de l'époque étaient encore actuelles, comme le manque de logement.

Photo : Radio-Canada / Félix Lebel

L’aventure du journal Atuaqnik a été flamboyante, mais de courte durée. Le financement obtenu par la société Makivvik n’a pas été renouvelé, et le gouvernement fédéral a refusé de leur octroyer une subvention.

On n'avait pas assez de financement. On a essayé de toutes les manières de convaincre les organisations de mettre un peu d’argent dans le journal. On essayait aussi d’avoir de la publicité pour couvrir nos dépenses. Mais le concept de publicité était encore nouveau dans la région!, se remémore Alec Gordon.

Gros plan sur un article titré « Atuaqnik may fold ».

Dans cet article d'un journal d'Ottawa, il était question de la fermeture éventuelle d'Atuaqnik avec le titre « Atuaqnik may fold ».

Photo : Radio-Canada / Félix Lebel

Une culture à dynamiser

Le trou laissé par la disparition d’Atuaqnik dans l’espace public du Nunavik a pris du temps à se colmater, selon le journaliste à la retraite William Tagoona.

Portrait de William Tagoona.

William Tagoona a eu une longue carrière en communication et en journalisme au Nunavik.

Photo : Radio-Canada / Félix Lebel

Après son passage à Atuaqnik, ce dernier a été journaliste à CBC North pendant des décennies. Il est maintenant président de l'Insitut culturel Avataq, destiné à la promotion de l'histoire et la culture inuit du Nunavik.

Je suis persuadé que les médias ont un pouvoir sur la transmission de la culture, et malheureusement il y a un déclin. [...] Il faut se battre pour avoir un contenu d'information dans notre langue, qui présente notre réalité.

Une citation de William Tagoona, ancien journaliste

Il s’insurge par ailleurs des propositions récentes du Parti conservateur du Canada concernant une éventuelle annulation du financement de CBC, qui aurait un effet dévastateur dans les régions nordiques selon lui.

Nous avons déjà entendu ces idées dans le passé, c’est de l’ignorance. C’est d’ignorer la réalité du Nord. Ce n’est pas comme au sud où il y a une multitude de médias. Nous en avons peut-être deux ou trois pour un immense territoire., explique William Tagoona.

Ce dernier espère par ailleurs que la plus jeune génération sera sensible à la vitalité de l’Inuktitut et des médias régionaux, qui sont au cœur, selon lui, de l'identité des Nunavimmiut.

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