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Démystifier la plongée en apnée en quelques questions

Une plongeuse sous l'eau regarde vers la surface en compagnie d'autres plongeurs.

Sheena McNally a effectué une plongée de 82 mètres en immersion libre.

Photo : Alex St-Jean

Atteindre une profondeur de 112 mètres en 3 minutes et 24 secondes avec une seule inspiration, est-ce possible?

Le Français Arnaud Jerald a établi, le 15 septembre 2020, le record du monde en profondeur pour la discipline en poids constant bipalme en plongée en apnée.

Ces distances atteintes par les apnéistes d’élite sont impressionnantes et peuvent parfois sembler sortir d’un film de science-fiction. Comment font-ils pour rester sous l’eau si longtemps et résister à l’envie de respirer?

Sport d’élite ou récréatif, la plongée en apnée, plus connue sous le nom de freediving, ne cesse de gagner en popularité au Québec.

François Leduc, président fondateur et maître-instructeur à ApneaCity, répond aux questions de Radio-Canada Sports pour démystifier ce sport et défaire quelques mythes.


Marie-Eve sans limites

Consulter le dossier complet

Respiration avant une apnée statique

Q. Quelles sont les grandes lignes de la plongée en apnée?

R. Pour moi, le freediving c’est d’abord l’exploration du monde subaquatique avec le minimum de moyens. C’est à mon sens la façon la plus naturelle de découvrir le monde sous-marin et avoir l’opportunité de vivre des interactions incroyables avec la nature.

C’est probablement un des sports aquatiques en plus grande croissance dans le monde. Sa simplicité (peu d’équipement, palme, masque et tuba), le sentiment de liberté, le retour aux sources et l’équilibre entre le corps et l’esprit qu’offre la pratique de ce sport viennent, selon moi, accroître sa popularité.

Les gens recherchent de plus en plus un équilibre dans leur vie. Le silence et le calme que procure l’eau sont pour certains presque une forme de spiritualité.

La plongée en apnée tient autant de la méditation que du sport. Je fais souvent le parallèle entre le développement du freediving et celui du surf, il y a 50 ans, en raison du style de vie qu’apporte notre sport.

Il y a un côté récréatif (l’exploration et la conservation) et le côté compétitif.


Q. La question que tout le monde se pose… Comment les apnéistes font-ils pour retenir leur souffle si longtemps?

R. Presque tout le monde est capable de retenir son souffle sous l’eau pendant au moins deux minutes, même si on peut imaginer le contraire! Quand on atteint des temps plus élevés ou lorsqu’on parle des records canadiens et du monde, on doit entraîner son corps et son esprit, c’est comme n’importe quel autre sport. Ce qui rend notre sport unique c’est que l’air ne circule pas puisque nous n’avons pas un nouvel apport d’air.

L’important, c’est de comprendre le mécanisme de la respiration et ce qui se passe dans notre corps.

La science a démontré que nous avons des réflexes qui ressemblent à ceux des mammifères marins, ce qu’on appelle le réflexe d’immersion. Lorsque notre visage est immergé, une des réponses envoyées par notre corps est la diminution des fréquences cardiaques ce qui diminue la consommation d’oxygène et nous permet d’être plus efficaces sous l’eau.

Et ça, tout le monde a ça à la naissance, mais on le perd en grandissant. Les apnéistes ne développent pas des branchies!


Q. Pourquoi la plongée en apnée est-elle considérée comme un sport extrême?

R. Je pense que le côté extrême de ce sport vient avec les records. Le concept de la compétition c’est d’essayer d’être le meilleur, d’aller plus profond, de rester sous l’eau le plus longtemps, et ce, dans un milieu qui peut être parfois dangereux. Pour ce faire, il y a une notion de dépassement extrême des limites. Le risque ultime c’est de faire un blackout et possiblement d’en mourir.

Quand j’ai commencé à pratiquer le sport, c’était souvent ce côté qu’on voyait dans les médias. Maintenant, avec la formation et le développement des communautés, les gens sont beaucoup plus conscientisés à une pratique sécuritaire du sport.

Par exemple, au sein de notre communauté, nos athlètes qui font des syncopes ou qui perdent connaissance parce qu’ils ont dépassé leur limite, on leur demande de comprendre ce qui est arrivé pour qu’ils puissent apprendre de leur erreur. Il n’y a aucun prestige à se rendre à ce point.

Je tiens à réitérer que la pratique récréative ou sportive de ce sport ne se fait jamais seule et que les apnéistes sont certifiés. En compétition, les apnéistes sont accompagnés d’une équipe de sécurité pour répondre rapidement aux différentes situations.


Q. Le berceau de ce sport se trouve en Europe. Est-il possible de pratiquer ce sport au Québec?

R. Absolument! Et nous avons une très grande communauté d’apnéistes.

Deux des trois disciplines du sport (l’apnée dynamique et statique) se pratiquent en piscine. En ce qui concerne la profondeur, il y a certaines limites. Mais même si nous n’avons pas accès directement à l’océan, nous avons de très beaux lacs et carrières où nous pouvons atteindre une certaine profondeur.

Certes, l’eau est plus froide que dans le Sud et la visibilité peut être moins bonne, mais nous avons de belles choses à voir dans nos cours d’eau et des endroits magnifiques à découvrir.

L’élément manquant, si on compare à l’Europe et ailleurs dans le monde, c’est un lieu de pratique pour la profondeur en hiver. Ils ont une vingtaine de fosses de 15 à 20 mètres de profondeur, alors qu’en Amérique du Nord, il y a la fosse au centre de formation en plongée professionnelle à l’Institut maritime du Québec et le bassin de la NASA.


Q. Quelle est la place des femmes dans le sport?

R. Au début d’ApneaCity, c’était majoritairement des hommes qui pratiquaient ce sport. Mais depuis les dernières années, la vision du freediving a changé. Maintenant, il y a beaucoup de femmes qui pratiquent le freediving et je dirais que dans les deux dernières années, lors des formations, les groupes sont majoritairement féminins.

Je pense également qu’il y a de plus en plus de modèles féminins au niveau élite canadien et mondial. Elles sont de plus en plus visibles et elles changent le visage du sport. Par exemple, Joannie Huberdeau a établi une marque canadienne d'apnée dynamique sans palmes en nageant sur une distance de 127 mètres. Sheena McNally, originaire d’Edmonton, a atteint une profondeur de 82 mètres sous l'eau à Roatan. Elle figure deux fois dans le top 10 mondial.

Le côté exploration, détente, lâcher-prise est très présent et je pense que ça rejoint aussi une clientèle féminine.


Q. Avons-nous une élite sportive au Canada?

R. Notre coach William Winram est encore aujourd’hui un des athlètes les plus reconnus dans le monde. Il détient encore plusieurs records nationaux et panaméricains. Il a également accompli quelques records du monde.

Nous avons également de nouveaux athlètes qui continuent d’évoluer et qui décrochent des records nationaux.

Par exemple, Sylvain Desaulniers a participé aux Championnats du monde d'apnée sportive à Belgrade, en Serbie, en 2018, et est le champion canadien en apnée statique et en dynamique monopalme en piscine.

Avec l’essor que connaît notre sport, je suis certain que nous allons voir de plus en plus de nos athlètes établir de nouvelles marques canadiennes et possiblement sur la scène internationale.

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