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Certains aliments ont-ils vraiment un effet sur la libido? | Photo : Radio-Canada / Ariane Pelletier

Le chocolat, les huîtres et les fraises auraient, dit-on, des propriétés aphrodisiaques. En déguster provoquerait une hausse de la libido, du désir et de la performance au lit. Vraiment? Et si l’ambiance feutrée et les regards coquins avaient plus de pouvoir que les truffes ajoutées aux pâtes? 

Les aphrodisiaques tirent leur nom d’Aphrodite, la déesse grecque de l’amour. Le concept est loin d’être nouveau. Déjà au 17e siècle, ces aliments étaient offerts aux couples nouvellement mariés pour assurer leur fertilité. Autant les amandes que les pigeons ont été considérés comme efficaces pour raviver la libido à l’époque. 

Les aliments chers, tels que le foie gras ou le caviar, ou possédant une forme rappelant un organe sexuel, comme les huîtres et les asperges, ont tous été catégorisés comme aphrodisiaques à un moment ou à un autre de l’histoire. 

Dans certains restaurants, à la Saint-Valentin, des menus spéciaux sont imaginés autour de ces fameux ingrédients pour pimenter la vie sexuelle de la clientèle. Mais ces aliments détiennent-ils ce pouvoir si convoité? Pas vraiment. Le contexte dans lequel ils sont consommés et l’effet placebo sont sans doute les véritables responsables de l’éveil du désir parfois observé. 

Des aliments coquins sous la loupe de la science

Je ne vois pas ce qu’il y a d’aphrodisiaque dans une huître sinon son aspect physique, remarque le chimiste Yannick Bergeron. Le bruit, la texture et la façon de la manger vont peut-être provoquer une réaction, mais il n’y a pas d’études qui soutiennent ça. Le scientifique explique que l’efficacité aphrodisiaque des aliments n’a pas été démontrée. 

« L’effet placebo est très fort. On pense tellement que ça fonctionne qu’on va associer la consommation d’un aliment à des effets sur la libido alors que ça provient sans doute du contexte et de notre croyance que ça fonctionne. »

— Une citation de  Yannick Bergeron, chimiste
Le chocolat noir contiennent de la quercétine, qui a un effet sur la circulation sanguine.
Le chocolat noir contiennent de la quercétine, qui a un effet sur la circulation sanguine. | Photo : iStock

Eh non, le Viagra naturel pour améliorer la sexualité n’existe pas. Ou n’a pas (encore) été découvert. Certains aliments ont des fonctions anti-inflammatoires, ce qui aide la circulation sanguine et la dilatation des vaisseaux vers les organes génitaux. Les baies, le vin rouge et le chocolat noir contiennent de la quercétine(Nouvelle fenêtre), qui a un effet sur la circulation. 

Geneviève Côté note toutefois que ces effets surviennent seulement chez les personnes ayant des problèmes de circulation sanguine. Et une grande quantité doit être consommée pour arriver à de tels résultats, ce qui les rend improbables dans la réalité. 

Le safran, comme bon nombre d’épices, figure souvent sur des listes des aliments à ajouter à son menu pour attiser le désir lors d’une soirée en amoureux. L’histoire autour du safran est sans doute responsable du mythe sur ses propriétés aphrodisiaques. On parle d’un ingrédient qui s’obtient grâce aux organes génitaux d’une fleur. Ça frappe l’imaginaire.  

Guillaume Mathieu, cofondateur de l’agence marketing Ilot, affirme que mêler sexe et bouffe d’un point de vue marketing est souvent une formule gagnante, notamment à la Saint-Valentin. La nourriture est une arme de séduction massive , soutient-il. C’est pourquoi il encourage les propriétaires de restaurant à embrasser l’imaginaire associé à l’amour pour mettre de l’avant des produits présents sur leur menu, comme les huîtres. 

Le plaisir dans l’assiette, le plaisir sous la couette 

La sexologue Geneviève Côté estime que trop d’importance est mise sur le désir alors que le feu qu’il faut allumer est le plaisir. Les aliments aphrodisiaques contribuent à jouer dans ces eaux amusantes, et ainsi, provoquent une montée de l’attraction. 

« C’est le contexte dans lequel on va manger du chocolat qui détermine la finalité. On aime ça, alors on a une posture mentale où l’on se laisse plus aller et l’on est dans le plaisir. C’est là que la fraise trempée dans le chocolat peut aider la sexualité. »

— Une citation de  Geneviève Côté, sexologue

Le chocolat est indissociable de la Saint-Valentin. Ses vertus aphrodisiaques(Nouvelle fenêtre) n’ont pourtant jamais été prouvées. Il n’existe que très peu d’études scientifiques à ce sujet, et la majorité d’entre elles sont démolies lorsqu’elles tracent des liens entre la consommation d’un aliment et le désir , constate le chimiste Yannick Bergeron. 

Malgré les nombreux chocolats offerts, la Saint-Valentin n’est pas la période la plus lucrative pour l’industrie du chocolat. Selon les données rassemblées par l’agence de marketing agroalimentaire Ilot, Pâques surpasse la fête de l’amour en ce qui concerne les ventes de cette friandise, suivie de l’Halloween et de Noël. Le 14 février vient ensuite. 

Et les boissons alcoolisées? 

« Le danger qui me guette, c'est d'oublier que je suis un alcoolique », nous a expliqué Alain, abstinent depuis une vingtaine d'années et membre des Alcooliques Anonymes au Témiscouata.
« Le danger qui me guette, c'est d'oublier que je suis un alcoolique », nous a expliqué Alain, abstinent depuis une vingtaine d'années et membre des Alcooliques Anonymes au Témiscouata.  | Photo : Getty Images

L’alcool, en contrepartie, pourrait contribuer à attiser le plaisir chez les partenaires(Nouvelle fenêtre). Ses fonctions inhibitrices ont le potentiel de favoriser des rapports sans gêne. Ce n’est pas sans risques. Ces substances peuvent aussi réduire la performance. 

« Avec l’alcool, c’est un coup de dé. Ça peut éteindre ou égayer la sexualité. »

— Une citation de  Yannick Bergeron, chimiste

S’il y a une baisse du désir, ce n’est pas un repas aphrodisiaque qui va raviver la flamme, précise Geneviève Côté. La sexualité est multidimensionnelle : elle touche les relations, la psychologie, la santé. C’est pourquoi la sexologue suggère aux personnes qui ont des problèmes liés à leur intimité de consulter. 

La sexologue relève que la diète méditerranéenne(Nouvelle fenêtre), basée sur la consommation de plantes en abondance, de poissons et de noix, favorise une meilleure santé sexuelle.

En plus de l’alimentation, on peut se demander si c’est le fait d’être actif, d’être bien dans sa peau, d’avoir de l’énergie qui ultimement contribue à une sexualité plus satisfaisante , mentionne Geneviève Côté. Le style de vie a plus d’influence sur le plaisir qu’un seul aliment peut avoir. 

À jouer avec le feu, on finit par se brûler 

On serait prêt à tout pour éveiller sa libido.
On serait prêt à tout pour éveiller sa libido. | Photo : iStock

Cette inefficacité aphrodisiaque des aliments est… une bonne nouvelle. Car des effets secondaires aussi puissants sur la libido peuvent être dangereux. La recherche de nourriture stimulant le désir a d’ailleurs mené à la consommation d’ingrédients plutôt risqués, comme la mouche espagnole. 

L’extrait de cantharide(Nouvelle fenêtre) (insecte mieux connu sous le nom de Spanish Fly ) a longtemps été présenté comme stimulant sexuel. En réalité, son ingestion peut être mortelle. 

« On pense consommer ça pour tomber amoureux. Ça a plus tué des gens qu’autre chose.  »

— Une citation de  Yannick Bergeron, chimiste

On serait prêt à tout pour éveiller sa libido et magnifier ses ébats sous les draps. Au point de mal interpréter certaines réactions physiologiques. Des personnes vont décider d’utiliser du piment pour favoriser l’érection en en mettant une quantité sur le gland du pénis, note Yannick Bergeron. Ça crée une inflammation et ça provoque un grossissement de l’organe génital. Mais c’est une infection. On est loin d’un effet aphrodisiaque.  

Une chose est certaine, la libido ne tombe pas du ciel. Et comme le cerveau est un puissant organe sexuel, autant l’utiliser pour éveiller ses pulsions. Avec ou sans chocolat! Bien entendu, en cas de panne de désir, mieux vaut consulter un ou une sexologue. 

Certains aliments ont-ils vraiment un effet sur la libido? | Photo : Radio-Canada / Ariane Pelletier